l’Atelier
Il n’y a pas véritablement de tâches ingrates, l’important est de rester en contact avec la matière. Quand on s’y met avec du cœur le travail se fait sereinement.
J’ai choisi des directions de travail différentes parce que je n’aime pas être enfermé, ni dans un lieu, ni dans mon travail, ni avec les autres.
Je travaille dans des temporalités courtes, le temps d’un bronze puis celui de l’acier et enfin la terre par moments.
Peu importe la matière car l’attention et l’intention artistique sont intrinsèques, elles participent avant tout d’une démarche et d’un état d’être.
J’ai choisi des directions de travail différentes parce que je n’aime pas être enfermé, ni dans un lieu, ni dans mon travail, ni avec les autres.
Je travaille dans des temporalités courtes, le temps d’un bronze puis celui de l’acier et enfin la terre par moments.
Peu importe la matière car l’attention et l’intention artistique sont intrinsèques, elles participent avant tout d’une démarche et d’un état d’être.
Le temps me donne la mesure du geste qui va de mieux en mieux et j’exerce mon œil de jour en jour, mais il reste toujours perfectible et jamais aussi fin que le touché. Du bout des doigts je vois, je ressens toutes les irrégularités, les courbes et les creux, les accrocs et quand je crois que tout va bien, que la pièce est finie, alors je la touche pour lui donner sa première peau.
Certains matins il y a rien à faire, la forge ne veut pas s’allumer. Hier encore deux bouts de cartons enflammés suffisaient à faire partir le charbon et en trois minutes la turbine soufflait un feu vaillant mais aujourd’hui c’est peine perdue. Je suis arrivé trop impatient et mes pensées sont ailleurs ou bien déjà loin devant et du coup le feu me boude, j’en oublie mes mains et je me brûle ! Mes gestes sont nerveux et je pense déjà à la chauffe oubliant l’étincelle, l’air se fait froid et tourne mon projet en fumée.
J’ai toujours mon Leica à l’atelier. Prendre des photos des œuvres en cours c’est aider mon œil à se déshabituer, cela permet de prendre du recul et de faire exister l’objet dans différentes lumières.
Parfois quand la création est bloquée je met en scène l’œuvre de différentes manières et je la regarde via la photographie, je crée ainsi un nouvel objet qui parle de celui qui en route et qui dit d’autres choses.
Mon ruban est comme un immense violon à une seule corde. Je fais courir sur le champignon les formes qui créent de la résonnance et les ondes me traverse jusqu’au bout des pieds. Son rythme est lent avec un aplomb de plusieurs tonnes. Chaque accident crée sur la lame une marque qui vient buter durement sur la coupe et fait jaillir une petite étincelle. J’ai mis entre la machine et moi moult protections pour pallier aux éclats brulants qui volent et qui se collent lâchement sur la peau. Je me retranche ainsi en moi même bien protégé au fond de mes pensées scindé en deux hommes, l’un qui tient la pièce et anticipe tous les risques en suivant bien le trait et l’autre qui à un petit vélo qui pédale au loin dans le monde et les péripéties du rêveur.
Plus le temps passe et moins j’ai envie de parler.
Longtemps j’ai été mal à l’aise avec ça et puis je m’y suis fait.
J’ai même rencontré des gens comme moi.